Après un tour sur ces autres champs de bataille le mardi 28 juin 2022, Claude Agossa donne à ses poulets leur 2e repas de la journée dans l'annexe de son entreprise sise à Bonou dans la Vallée de l'Ouémé
L’ambassade des Etats-Unis au Bénin peut se réjouir d’avoir contribué à faire plusieurs jeunes entrepreneurs, militants des droits de l’homme, leaders béninois, etc. Claude Agossa est l’un d’eux. Jeune entrepreneur, originaire de la commune d’Adjohoun dans le département de l’Ouémé, son entreprise est spécialisée dans l’aviculture et le maraîchage. En 2019, il a bénéficié d’une formation en leadership et en gestion du plan de vie et de carrière grâce au projet “Les Ambassadeurs de la Vallée de l’Ouémé”. Ce projet financé par la représentation diplomatique américaine dans le cadre du programme “1000ToImpact” (1000 dollars pour impacter, Ndlr) a été piloté par US-BWAA, le réseau des femmes bénéficiaires des programmes d’échange américains au Bénin. Il avait pour objectif de former 50 jeunes de la vallée de l’Ouémé au leadership, la gestion de plan de vie et l’entreprenariat. Maire des jeunes de la commune d'Adjohoun depuis 2020 et membre de la coopérative “Agri-Lumière” de Bonou, spécialisée dans le maraîchage, Claude est fier d’avoir pris part au projet “Les Ambassadeurs de la Vallée de l’Ouémé”. Travailler en groupe, souligne-t-il, n’est pas facile. « Mais grâce aux notions de leadership que j’ai appris au cours de la formation, j’arrive à trouver le juste milieu pour que nous puissions atteindre nos objectifs », partage-t-il heureux. Or, reconnaît-t-il, en postulant pour ce projet, il ne pensait pas en sortir autant grandi. « Désormais, j’ai une vision claire et des objectifs précis pour mon entreprise », s'enorgueillit-il. En 2019, lorsque Claude participait au projet, il avait déjà entamé un projet d’élevage. Avant la formation sur la gestion du plan de vie et de carrière, il possédait 20 têtes de poulet Goliath qu'il conduisait « difficilement ».
Organisation et croissance
Grâce au projet, Claude Agossa s’est mieux organisé, s’est fixé des objectifs et travaille pour les atteindre. Il dispose d’une ferme et des annexes pour l’élevage dans la commune de Bonou et d’un point de vente. « Aujourd’hui j’ai plus de 300 têtes de poulet et plusieurs dizaines de poussins en croissance, etc. J’ai des couveuses et je fais la livraison des poussins, des dindonneaux, coquelets, pintadeaux, etc. ». Si jusqu’en 2019, Claude Agossa n’avait aucune idée de ce qu’il voulait « concrètement » pour son entreprise, depuis la formation sur la gestion du plan de vie/carrière, il a des objectifs clairs. « Je sais ce que j’attends déjà pour 2023-2024. Depuis qu’on a fini la formation, j’ai essayé d’élaborer un plan que je suis chaque jour. J’ai des visions. (…) Je me suis dit que chaque année, je vais augmenter d’une vingtaine à une cinquantaine de têtes », explique-t-il.
Claude est fier d’avoir bénéficié de ce programme. « Il y a des difficultés, voire des échecs. Mais nous les prenons comme des défis à relever », partage le jeune agri-preneur. En plus d’avoir réussi à augmenter son chiffre d’affaires, atteint peu à peu ses objectifs et stabilisé son activité, Claude s’investit désormais dans la santé animale. Titulaire d’une Licence en Agronomie, spécialité production et santé animale, il avait dû très tôt tourner dos à sa formation de base face aux réalités de l’emploi au Bénin. « Je n’envisageais pas servir la population en santé animale mais grâce à mon entreprise, les amis viennent me poser des problèmes et j’ai décidé d’exercer mon métier de base », confie-t-il tout heureux. Le jeune entrepreneur est sollicité « un peu partout » pour des prestations vétérinaires.
Sur le terrain de la citoyenneté et du leadership civique
Claude Agossa (à gauche), maire des jeunes d’Adjohoun et François Zannougbo, maire d’Adjohoun, le 1er août 2022, lors de la célébration du 61e anniversaire de l’accession du Bénin à l’indépendance
Tout comme Claude, Rolande Kakpotindji est un autre success story du projet “Les Ambassadeurs de la Vallée de l’Ouémé”. C’est avec beaucoup de fierté sur le visage qu’elle partage son parcours depuis sa participation au projet. Membre de la Jeune chambre internationale (JCI) Porto-Novo Impact depuis 2019, elle a remporté, en 2021 le trophée de « membre la plus remarquable » des quarante-sept (47) organisations locales de la JCI-Bénin. Ce qui lui a valu son poste dans le cabinet de l’actuelle présidente nationale en tant qu’Assistante spéciale chargée de la promotion de l’enfance.
Lors de cette formation financée par l’Ambassade des Etats-Unis, Rolande Kpakpotindji a beaucoup appris sur le militantisme féminin ; le leadership et l’autonomisation des femmes, la prise de parole en public et la prise de décision. Grâce aux acquis de ce programme, la jeune ressortissante de la commune de Bonou dit s’être distinguée dans les organisations associatives où elle s’est engagée plus tard. De Chargée des affaires féminines de l’Organe consultatif de la jeunesse (OCJ) de Bonou et de Porto-Novo, ou encore de l’Union nationale des étudiants de Bonou en passant par son statut de membre de la JCI Porto-Novo Impact, elle fait parler d’elle par diverses distinctions. « Si j'ai atteint ce niveau dans le militantisme associatif, j'avoue que ce pojet y a fortement contribué », reconnait-elle.
Wilfried Agoundjèkpo et Chiarath Moutaïrou ont, quant à eux participé à une autre initiative ayant impacté la jeunesse béninoise. C’est le projet Ateliers de la démocratie (ADEMO 2018), financé par l’Ambassade des Etats-Unis et piloté par l’association des bénéficiaires du programme YALI au Bénin (BYAA). Pendant six jours, les participants, près de mille jeunes béninois, ont été aguerris sur la citoyenneté, la démocratie, le fonctionnement des institutions de la République, la décentralisation, la gouvernance, entre autres. Wilfried assure qu’il « opine objectivement » sur les faits de gouvernance ou encore de démocratie au Bénin depuis sa participation aux ADEMO. Biologiste médicale de formation, Chiarath elle, fait partie des jeunes qui ont introduit des requêtes à la Cour constitutionnelle après les ADEMO 2018 et en est fière. La jeune béninoise confie qu’avant sa formation, elle ne savait « pratiquement rien sur comment formuler et adresser un recours à la Cour constitutionnelle » et pourquoi le faire. Comme eux, des centaines de Béninois ont pu se tracer et suivre un chemin, en partie grâce à une formation, un projet ou un atelier financé ou organisé par l’Ambassade des Etats-Unis au Bénin.
Challenges
D’un projet à un autre, plusieurs difficultés sont rencontrées soient par les derniers bénéficiaires, soient par les porteurs de projets, ou encore les deux parties. Ces difficultés ne sont pas sans impacts sur l’exécution du projet ou son avenir. Les « ADEMO 2018 », piloté par BYAA, le réseau des bénéficiaires du programme YALI, contrairement à ce qui était souhaité, n’ont pas pu être dupliqués par plusieurs participants par manque de moyens financiers. C’est le cas de Souad Adéchoubou. Activiste des droits de l’homme, la jeune femme n’a pas pu organiser une séance de restitution, comme convenu aux ADEMO 2018. « Pour dupliquer, il faut les moyens, surtout financiers », fait-elle remarquer. En plus, même s’il y avait des jeunes intéressés, il fallait pouvoir les nourrir et assurer leur déplacement. « Si pour nous autres il n’y a pas eu de perdiems pour le déplacement, les autres ne peuvent pas l’accepter. Les questions ne manquent pas : Est-ce qu’il y a de l’argent ? Est-ce qu’on va manger ? », déplore la jeune femme. En 2018, ajoute-t-elle, elle ne disposait pas encore d’un carnet d’adresse pour solliciter un quelconque soutien. Même ceux qui ont pu le faire, il leur a été difficile de bien organiser la restitution. « Il n’y a pas eu de montant forfaitaire pour organiser la restitution. Nous l’avons fait avec nos maigres ressources. Mais il a été difficile pour nous d’assurer la collation des participants », a confié Wilfried Agoundjèkpo, jeune béninois ayant participé aux ADEMO 2018.
Malgré les 75% de restitutions dont se félicitent les organisateurs des ADEMO, les participants déplorent un manquent d’accompagnement financier et logistique pour l’effectivité de ses séances. « Il n‘y a pas de communication pour permettre de suivre ceux qui se sont engagés à faire la restitution », déplore Wilfried Agoundjèkpo, un des participants. « Le talon d’Achille, ce sont les restitutions », admet. Le concept, défend Nicaise Déguénonvo, président du BYAA au moment des ADEMO, était que les jeunes par leur leadership arrivent à dupliquer le programme.
Malgré ces challenges dans la duplication, l’ambassade assure que les ADEMO 2018 ont été un succès. Selon Nicaise Déguénonvo, coordonnateur du projet, plusieurs ont maintenu le cap. « Certains sont aujourd’hui conseillers communaux. Il y a même des CA parmi eux et il y en a qui excellent dans plusieurs secteurs », se réjouit-il.
Les coordonnateurs de projets se défendent
Marcel Zoumènou, coordonnateur du projet "Les Ambassadeurs de la Vallée de l'Ouémé"
Les bénéficiaires des programmes, même ceux qui ont réussi dénoncent tous un manque de suivi après les formations. Marius Gbénou est jeune entrepreneur résident à Bonou. Bénéficiaires du projet « Les Ambassadeurs de la vallée de l’Ouémé », son ami et lui ont porté un projet de fabrication de l’huile de palme dans le cadre du concours organisé à cet effet. A l’issue du concours, leur projet a été sélectionné par le jury. Les lauréats ont remporté une somme de cent mille (100 000) francs CFA pour démarrer leur entreprise. Mais depuis 2019, ils disent n’avoir pas fait l’objet de suivi par les organisateurs. « Ils ne savent même pas si nous avons partagé l’argent et chacun a pris son chemin ».
Selon Esther Djossa, coordonnatrice du programme « 1000ToImpact », il ne revient pas à une équipe de l’ambassade, représentée par l’association US-BWAA, d’aller vers les derniers bénéficiaires. « Nous n’avons pas directement accès aux bénéficiaires des projets financés dans le cadre du programme. Donc, ce n’est pas à nous d’aller vers eux pour un quelconque suivi », balaie-t-elle.
Marcel Zoumènou, coordonnateur du projet « Les Ambassadeurs de la vallée de l’Ouémé » ne reste pas insensible aux sacrifices, sentiments et ressentis des bénéficiaires, même s’il informe qu’« un groupe WhatsApp a été créé après la formation pour recueillir les difficultés des participants et il n’y a pas eu de feedback ». Sur les 1000 dollars, il comptait « mettre un peu d’argent de côté » pour la mise en place d’un comité de suivi des bénéficiaires à la fin du projet. « Hélas, les fonds n’ont pas suffi. J’ai dû même mettre des fonds propres pour couvrir toutes les charges », se défend-il.
Esther Djossa, la coordonnatrice du programme « 1000ToImpact » estime qu’il revient aux porteurs de projets de bien ficeler les choses lorsqu’ils élaborent leur budget d’exécution. « Les bénéficiaires sont responsables de proposer un budget et des activités qu'ils peuvent raisonnablement accomplir en utilisant ce budget. Si un bénéficiaire trouve que le budget est insuffisant, il doit parler avec l'ambassade pour discuter de la manière dont les activités du programme peuvent être modifiées », répond l’ambassade des Etats-Unis au Bénin.
En dehors des projets individuels portés par des anciens bénéficiaires des programmes d'échange américains, l'Ambassade des Etats-Unis finance également des projets communautaires portés par des organisations béninoises. Que ce soit des mini financements (small grants: entre 1000 et 5000 dollars) ou grands financements (plus de 5000 dollars), chaque projet a impacté à sa manière la communauté, la société béninoise en dépit des défis.

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